- VIDAL (G.)
- VIDAL (G.)VIDAL GORE (1925- )Spirituel, maussade, turbulent, vaniteux, acerbe, arrogant, facétieux, provocateur, y a-t-il un adjectif qui ne soit déjà venu sous la plume des journalistes qui ont essayé de cerner la personnalité publique de Gore Vidal tel qu’on le voit, à la tribune ou à la télévision, descendre en flamme ses cibles favorites? L’homme est depuis longtemps un enfant terrible et chéri des médias, et on ne compte plus les épisodes qui ont défrayé la chronique: la prise de bec avec William F. Buckley Jr., la bagarre avec Norman Mailer, le procès contre Truman Capote.Enfant unique, Eugene Luther Vidal est né le 3 octobre 1925 à l’Académie militaire de West Point où son père enseignait à l’époque. Nina Gore, sa mère, issue d’une vieille famille anglo-irlandaise venue en Amérique au XVIIe siècle, était la fille de Thomas Pryor Gore qui fut, à partir de 1907, le premier sénateur du nouvel État de l’Oklahoma. En 1935, les parents d’Eugene Vidal divorcent, et sa mère se remarie avec le riche banquier Hugh D. Auchincloss, qui épousera en troisièmes noces la mère de Jacqueline Bouvier Kennedy, ce qui donnera à Gore Vidal dans les années 1960 un lien personnel, quoique ténu, avec le président Kennedy. Élève de la Phillips Exeter Academy à partir de 1940, Eugene Vidal commence un roman sur Mussolini et prend désormais le nom de «Gore» Vidal. Quand Gore Vidal sort d’Exeter, en 1943, il a dix-huit ans et l’Amérique est en guerre. Il s’engage et se retrouve officier dans le transport de troupes. Croisant dans les parages des îles Aléoutiennes, il commence à écrire Williwaw (paru en 1946): Williwaw, c’est le nom qu’on donne là-bas à un orage de mer brusque et violent, et le roman, dans le style d’Hemingway, avec des réminiscences de Conrad, est le récit du comportement des sept occupants d’un navire de transport pris dans la tourmente.Démobilisé, Gore Vidal s’installe au Guatemala, où il écrit un autre roman, In the Yellow Wood (1947), histoire d’un homme qui, après la guerre, hésite sur le chemin à prendre au sortir du «bois jaune» dont parle le célèbre poème de Robert Frost. Puis vient le livre qui lui apportera à la fois la notoriété et la fortune par le scandale qu’il suscita à l’époque: The City and the Pillar , dont le titre biblique est emprunté à l’épisode de Sodome et Gomorrhe (écrit en 1946, publié en 1948). Ce roman aujourd’hui fait plus penser au Gatsby de Fitzgerald qu’à Genet, mais à l’époque le New York Times refusa d’en passer la publicité. Néanmoins, ou pour cette raison, le chiffre des ventes permit à Gore Vidal d’acheter «Edgewater», une vieille maison des années 1820, où il écrivit ses cinq romans suivants, dont le plus connu est sans doute The Jugement of Paris , paru en 1952. Abandonnant pour un temps le roman, Gore Vidal écrivit toute une série de dramatiques pour la télévision. Au cinéma, il participa avec Tennessee Williams à l’écriture du script de Senso de Visconti (1954) et à celui de Soudain l’été dernier de Mankiewicz (1959). Il écrivit également la première partie du remake de Ben Hur (1959). Puis il se tourna vers le théâtre, avec notamment The Best Man (1960), satire sur la vie politique américaine. Gore Vidal est à cette époque au cœur de la question: il est, en 1960, candidat démocrate dans une circonscription plutôt républicaine de New York et fait un score honorable. Il n’en restera pas là: en 1970, il fonde avec le docteur Benjamin Spock le People’s Party et, en 1982, il essaiera en vain d’obtenir la nomination démocrate pour un siège de sénateur en Californie.Ce n’est qu’en 1964 qu’il revient au roman, avec Julian , une biographie romancée de Julien l’Apostat. Puis, suivant les traces d’Henry Adams, avec qui il a quelques affinités, et de son roman Democracy (1880), il donne avec Washington D. C. (1967) un portrait du monde politique de la capitale entre 1937 et 1952 qui inaugure sa «quadrilogie américaine». Viennent ensuite Burr (1973), une évocation de cet aventurier de la politique que fut, en 1800, le vice-président de Jefferson, puis 1876 (1976) et, enfin, Lincoln: a Novel . Un autre aspect de son talent s’épanouit pendant ce temps dans Myra Breckinridge , paru en 1968, où l’analyse burlesque de la transsexualité se double d’une attaque au vitriol contre la culture américaine, et dans sa suite, Myron (1974). En 1979, Gore Vidal’s Caligula (le titre original) est porté à l’écran, mais Vidal trouve que cette production trahit son script original, et il fait retirer son nom du générique. Kalki (en 1978) est le récit apocalyptique de la tentative que fait un certain James J. Kelly, qui pense être la dernière réincarnation de Vishnu, pour détruire le monde et le repeupler à partir d’une semence triée sur le volet. Creation (1981) nous promène sur les traces de Cyrus Spitama, disciple et petit-fils de Zoroastre, à travers le monde antique du Ve siècle avant notre ère jusqu’aux confins lointains de la Chine, tandis que Duluth (1984), avec son écho de «Dallas», nous ramène à l’univers américain pour lequel Gore Vidal reste impitoyable.
Encyclopédie Universelle. 2012.